Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Lloas
31 janvier 2010

Il s'appelait Marc-Vivien...Et toi, Frédéric...

Il s'appelait Marc-Vivien Foé

Aurevoir, frère très estimé.

Paris, le 27 juin 2003: Il est des articles qui vous coûtent, qui vous coûtent tellement qu'il en est indécent de dire plus.

Talleyrand avait le sens de la formule. Il aurait dit peut-être: "Aurevoir, frère très estimé."

Aucune formule ne sera vraiment juste pour exprimer le sentiment extrême qui en ce moment guide ma démarche. S'il fallait commettre un article, voici le dernier qu'il me serait donné d'avoir rêvé.

C'est donc bien vrai. Le milieu de terrain international Foé est parti, vaincu par le sort, vaincu par son métier, terrassé par sa passion, la même passion qui brûle l'Afrique entière, le Cameroun entier.

Marc-Vivien Foé a quitté ses amis, nous, ses nombreux compatriotes, de la manière la plus insolente qui soit donnée à ceux qui restent. Faudra-t-il évoquer la lenteur des secours lorsque le géant de Nkoabang s'est offert aux regards des téléspectateurs, les yeux révulsés, inerte déjà livré à des dieux que nul ne rencontre que lors de son dernier périple?

Foé, il me faut cette témérité, cette insolence pareille au sort qui t'arrache à l'amour de tout un pays, à tous ceux qui t'aimaient de par le monde, pour vouloir que tu ne t'en ailles pas sans te dire combien de vide, d'amertume, de colère ton départ crée parmi nous qui restons.

Là-bas, à Nkoabang, chez les Mvog Manga tes pères, la douleur sera pire, j'en suis sûr, Foé. Pire que toute cette souffrance que nous mesurerons mieux dans un mois, dans un an, pour le reste de notre vie.

Huit ans déjà que tu régalais les Camerounais de ta fausse nonchalance, de ton jeu aérien exceptionnel, de ta personnalité si affable. Au moment où j'écris ces mots, Foé, les larmes intarissables, ton ami d'enfance est à mes côtés. Nous nous réjouissions tellement de l'entendre nous narrer tes qualités avec la fierté des vrais amis, ceux qui ne sont pas les amis de circonstance, car ton statut de star incontestée des stades t'avait apporté la méfiance compréhensible envers les fausses sollicitudes.

Il t'arrivait toujours de t'échapper de cette gangue pour préserver ce que tes parents avaient fait de toi, un homme attentif aux chants des âmes. Alors tu étais l'invité d'un inconnu, que tu allais encourager à persévérer dans sa voie de peintre. Tu n'oubliais pas que tes amis chérissaient autant que toi leur passion, ils l'ont souvent assouvie ces derniers temps grâce à ton concours toujours discret. Racine Sagath, inutile de le deviner, est inconsolable ce soir, pour très longtemps encore.

Foé, le nom porte aussi chez nous l'indication du caractère de l'être qui le porte. On t'appelait Marc-Vivien, ce qui indiquait la vie à laquelle tu étais dédié, nous t'appelions aussi simplement Foé, alors tu t'arrêtais à ce nom, tu te retournais, où que tu fusses, et tu nous donnais ton sourire, parfois, il nous fallait arrêter le mouvement de tes mains, pour que tu n'en sortes pas des billets dont la valeur nous pétrifiait toujours. Je ne sais quoi penser de ce que tu t'en sois allé avec cette médiatisation. Vraiment, Marc-Vivien, je me plais à penser que c'est là le sort de ce message que tu étais venu livrer à nous autres, tes admirateurs, tes amis, tes frères. Le message d'un jeune homme sorti de l'anonymat le plus complet pour s'illustrer avec la classe des êtres hors hiérarchie. Sans jamais en perdre l'humilité propre à ces danseurs funambules qui apprennent chaque jour la tension entre le haut et le bas du pavé. Une distance très tenue que tu as aujourd'hui franchie.

Il m'est intolérable d'entendre encore cet ami, Marc comme toi, ton ami de tous les instants, qui brûlait de te revoir enfin, inconsolable à mes côtés. La dignité d'une vie tient à si peu, de l'avis de tous tu auras passé ta vie à te dépenser sans compter pour les tiens. Foé, retenons ton message, celui que ton nom t'a amené à donner au monde. Celui d'un jeune homme qui en 1992 jure à son ami qu'il sera de l'équipée américaine, tout joueur anonyme de deuxième division qu'il est encore. Et le monde retiendra de toi le talent éclaboussant d'un géant qui aura inscrit la marque du travail et de l'enthousiasme à tous ses gestes.

Les mots devraient être des miracles, Marc-Vivien, il est si vain d'user d'eux sans que jamais ils ne paraissent nous démentir, nous apprendre par une dépêche que les médecins se seront trompés, que tu es bien avec nous encore, pour très longtemps. Il nous manque le miraculeux des mots pour que le pays tout entier s'en empare pour conjurer cette terreur qui nous encercle: ton départ tellement violent, tellement impressionnant, tellement lourd de stupeur.

Marc-Vivien Foé, il est certain que les suites données à ton départ ignoreront sans doute le sens colossal de la discrétion que tu as mis à vivre, à répondre à toutes les sollicitations, dont celle-ci qui te permet de tirer ta révérence avec cette singularité soudaine.

Alors, permets-moi, permets-nous, à nous tes frères, tes amis, tes admirateurs, de te dire que tu auras redoré le blason de ta passion d'enfant de la balle. Nous ne pleurerons pas le match prochain, pour ma part, Foé, je serai à chanter l'esani, le rythme cher aux beti, afin que mon ami, mon frère, toi Marc-Vivien, toi Foé de Nkoabang, de Yaoundé, du Cameroun, d'Afrique, l'homme Foé simplement ait la terre légère, très légère.

_Ada BESSOMO_

Copyright (c) 2000 - 2009 Cameroon-Info.NET, All rights reserved.

Message du 13 mars 2009,

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Lloas a écrit...sur In Libro Veritas

j'aimerais tant
Cliquer sur les images pour ouvrir

et d'autres

Newsletter
16 abonnés
Lloas
Visiteurs
Depuis la création 57 518
Publicité