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Lloas

L'art de la soie, les Canuts de Lyon

_cliquer sur les images pour agrandir_

La_puissante_et_importante_ville_de_Lyon
Lyon au Passé_Bibliothèque Nationale de France (BnF)

En 1466 Louis XI sollicite la ville de Lyon pour qu’elle installe dans ses murs des métiers à tisser la soie
afin de freiner l’importation venant d’Espagne ou d’Italie.

Ville marchande, ville de foires, elle va refuser
prétextant ne pas vouloir mécontenter les riches marchands du nord de l’Italie.

Marchand_de_vêtements_de_soie, 15e siècle
Marchands de vêtements de soie au 15e siècle_Manuel médiéval

 

En 1536

François 1er propose de nouveau et accorde à Lyon
le privilège
du tissage des fils d’or, d’argent et de soie.

Etienne Turquet et Barthélemy Naris,
deux négociants d’origine piémontaise, vont être les pionniers de la soierie lyonnaise.

Étienne Turquet

Installés dans le quartier du Vieux Lyon et montée de la Grande-Côte.

Ils tissent souvent dans les derniers étages pour profiter de la lumière
et les ateliers ont des hauteurs de plafond habituelles.

Lyon Montée de la Grande Côte au 16e siècle
Montée de la Grande Côte aux origines

 

A la fin du 16e siècle

naît la « Corporation des ouvriers en drap d’or, d’argent et de soie »
qui fait travailler 10 000 Lyonnais.

En 1667 Colbert organise, par une ordonnance royale, la Grande Fabrique
qui regroupe tous les acteurs de la production de soieries.

Les tisseurs travaillent essentiellement au pied de la colline de Fourvière,
dans le quartier notamment de Saint-Georges.

 

Métier à tisser la soie_Soieries Saint-Georges
_Métier à tisser la soie_Atelier-musée des Soieries Saint-Georges, Lyon

 

A partir du 18e siècle

la Fabrique lyonnaise comporte trois classes distinctes:

Les « négociants » appelé également les « marchands-fabricants » et plus tard les « soyeux »,
entrepreneur capitaliste, marchand faisant fabriquer.

Ils se procurent la matière première, font teindre, se tiennent au courant des modes,
choisissent le dessin et passent commande aux chefs d’atelier.

Les « chefs d'atelier» ou « maîtres ouvriers » ,
tisseurs domiciliés et propriétaires de métiers, obligés de travailler pour le compte du fabricant et sous son contrôle
mais ils ne sont pas salariés.
Les négociants paient un prix de « façon » au moment de la livraison du tissu.

Les « compagnons »,
ouvriers travaillant et vivant chez le maître ouvrier sur des métiers appartenant à ce dernier.
Ils sont payés par le chef d’atelier.

 

Au 19e siècle

Montée de la Grande Côte au 19e siècle_vue du Plateau de la Crois Rousse
Montée de la Grande Côte au 19e sècle, vue du Plateau de la Croix-Rousse

A partir de 1815, les tisseurs s'installent en haut des pentes et sur le plateau de la Croix-Rousse,
quand la mécanique de Jacquard, installée au-dessus des métiers, sera au point.

Ces nouveaux métiers nécessitent des plafonds à plus de 4 mètres de hauteur
qui possèdent des poutres permettant de caler les métiers pour éviter les vibrations.

Rue du quartier des canuts_Lyon
_Une rue du quartier des Canuts_Musée Gadagne, Lyon

Habitat-atelier de Canut
_Habitat-atelier de Canut_Musée Gadagne, Lyon

L'habitat-atelier possède, au sol, des carreaux de Verdun.Habitat-atelier de Canut_Installation miniature
Dans un coin un plancher clos, à mi-hauteur et une échelle pour y accéder.

C’est la soupente ou la    « suspente »
où vont dormir les compagnons et les apprentis.

Dessous on trouve le « coin cuisine »
avec sa pierre d’évier.                                                                 

Musée Miniature et Cinéma, Lyon

 

 L'architecture des immeubles ateliers peut être qualifiée
d'architecture d'usine.

Ce sont des immeubles souvent de 4 étages,
avec des fenêtres très hautes, sans volet, sans encadrements ornés
et des façades  sans balcon.

On doit mettre, alors, sur le châssis de la fenêtre un papier huilé pour que la lumière soit diffusée
mais que les rayons du soleil ne décolorent pas les fils de soie qui sont teints.

Immeuble de Canut_Lyon, Croix Rousse

 

Le 23 octobre 1831

 Un prospectus annonce la parution de
L'ÉCHO DE LA FABRIQUE

_la première presse ouvrière_

spécialement consacré à la manufacture d'étoffes de soie
et de toutes les industries qui s'y rattachent.

Tous les Dimanches, à dater du 30 octobre.

Pour lire les détails et le but (généreux) de sa création
_cliquer sur le journal_


 

 Les révoltes de Canuts

 

-Fanion_de_la_devise_des_canuts
Fanion de soie de la devise des canuts

La révolte de 1831

Un contexte économique morose et l'affaiblissement de l'activité de la soierie
entraîne des baisses de salaires.

Les Canuts demandent et obtiennent du préfet du Rhône (Louis Bouvier-Dumolart), un salaire fixe
qui ne dépende plus des négociants qui répercutent les fluctuations du marché à la baisse.

Le préfet du Rhône est désavoué par Paris
au prétexte qu'il a enfreint La loi Le Chapelier de 1791 qui interdit les associations ouvrières.
Certains négociants refusent d'appliquer le salaire minimum accordé.

Le 19 novembre , au cœur de la Croix-Rousse,
les Canuts font face à la garde nationale. Des coups de feu claquent. La révolte gronde.

Revolte des Canuts 1831

Le 21 novembre 1831
les canuts descendent de leur colline, drapeau noir en tête,
et sont rejoints par les tisseurs des Brotteaux et ceux de la Guillotière.

Révoltes des Canuts 1831-gravure 1880

Le 22 novembre 1831
un combat sanglant a lieu au Pont Morand.

Révolte des Canuts 1831_Combat du Pont Morand

Le 23 novembre 1831
des ouvriers de tous les quartiers se joignent aux canuts
qui sont bientôt maîtres de toute la ville.

Les canuts et la garde nationale,
qui s'est finalement ralliée à eux,

constituent un comité insurrectionnel.

Le Président du Conseil Casimir Perier, par-dessus tout soucieux d'ordre, envoie 20.000 soldats
qui attendent que les insurgés se lassent...

Le 5 décembre 1831,
les troupes peuvent entrer dans la ville sans effusion de sang.

La garde nationale est désarmée et dissoute,
le tarif minimum abrogé
et le préfet, jugé trop conciliant, révoqué.

 
L
a révolte de 1834


La révolution industrielle et la libéralisation de l'économie
dégradent les conditions de vie des ouvriers artisans.

Ils s'organisent, de nouveau, en vue de contester le nouvel ordre social qui s'instaure progressivement
en les dépossédant d'un savoir-faire
par l'automatisation programmée et programmable des machines à tisser (sous forme de bandes de papier perforé)
et en les relèguant au rang de simple force de travail.

Métier Jacquard à cartons perforés
Métier "Jacquard" à cartons perforés_
Maison des Canuts, Lyon

Le ministre de l'Intérieur (un célèbre Adolphe Thiers), beaucoup moins accommodant que Casimir Perier.
  fait donner la troupe.

L’armée occupe la ville et les ponts.
Rapidement les premières fusillades éclatent avec la troupe qui tire sur la foule désarmée.
Aussitôt, les rues se couvrent de barricades.

"La semaine sanglante"

Revolte_des_Canuts_Lyon_1834_

Le 10 avril 1834
de nouvelles fusillades ont lieu avec la troupe.
Le drapeau noir flotte sur Fourvière, l' église Saint Nizier et l'hôpital de l'antiquaille

Le 11 avril 1834
 Le quartier de la Croix Rousse est bombardé par la troupe.

Le 12 avril 1834
La troupe attaque et prend le quartier insurgé de la Guillotière.

À Vaise, les soldats massacrent 16 habitants, hommes, femmes et enfants,
parce qu'un coup de fusil avait été tiré devant cette maison.

Le 14 avril 1834
L'armée attaque pour la troisième fois le quartier de la Croix-Rousse

Le 15 avril 1834
La deuxième grande insurrection des canuts est matée dans le sang

On compte

10.000 arrestations d'insurgés
jugés dans un « procès monstre » à Paris en avril 1835,
qui seront condamnés à la déportation ou à de lourdes peines

environ 600 morts

du 9 au 15 avril 1834.

 

La révolte des Voraces_1848-1849

Les Voraces désignent une société ouvrière lyonnaise regroupant des Canuts apparue en 1846,
en réaction à un changement de contenance du pot de vin.
Ils se regroupent dans les cabarets, les auberges et même, dit-on, dans la Cour des Voraces
pour échapper à la surveillance policière.

lyon_la cour des voraces_Crois Rousse
La cour des Voraces à la Croix-Rousse

Le 25 février 1848

A la proclamation de la République, les Voraces se manifestent au grand jour
en prenant possession, pendant 4 mois, des Forts de la Croix Rousse,
construits pour contrer toute nouvelle tentative de révolte.

Ils acceptent de les livrer « de bonne volonté,
après la démolition entière de tous les bastions et meurtrières, à la Garde Nationale. »
 

Bien organisés et solidement implantés parmi la population ouvrière,
les Voraces se présentent comme
« de simples ouvriers laborieux, patriotes zélés, républicains dévoués,
amis de l’ordre, soldats de la France et soutiens du bien public.
»

On fait appel à eux pour maintenir l'ordre dans le quartier des Canuts.

Le 21 mai1848

On incorpore dans la Garde Nationale "tous les corps irréguliers existant dans le département".
Les Voraces refusent, préférant « rentrer chez eux »
en prenant à témoin la population lyonnaise de ce « renvoi injurieux ».

Le 15 juin 1849,

faisant écho au soulèvement des républicains parisiens,
les Voraces appellent au renversement du Prince-Président Napoléon III et tentent d’organiser une insurrection.

La répression est violente.

Et la Société des Voraces n'existe plus.

 

Médaille recto _VoracesMédaille verso_Voraces
Médaille Révolution 1848_cuivre embouti

 

Au 20e siècle

Fin du 19e et 20e siècle : création d’usines pour le tissage de l’uni.

On passe de 18 000 métiers en 1815 à 30 000 en 1866
L'essentiel des soies est vendu sur le continent et dans les cours d'Europe
puis se déporte au Royaume Uni et aux États Unis.

Le monde des entrepreneurs s'élargit régulièrement.

Un_Canut_sur_son_metier_

Le nombre de canuts régresse
et ne reste que ceux qui fournissent un travail nécessitant un grand savoir-faire.


Métier « Jacquard » surmonté d'une mécanique Verdol_Musée arts et Métiers, Paris

Métier Jacquard mécanisé

Les métiers se mécanisent et les tisseurs vont abandonner peu à peu les étages des immeubles ateliers
pour œuvrer aux rez-de-chaussée.

Les ateliers libérés permettent leur reconversion en logements
pour une population d’ouvriers ou d’employés.
Le cubage de la pièce obligera ces derniers à mettre des faux plafonds afin de ne pas avoir trop froid.

 

Aujourd'hui

A la fin du 20e siècle, une nouvelle population plus fortunée, à la recherche de « l’authentique »
 prend possession des lieux.

Montée de la Grande Côte_Croix Rousse, Lyon
Montée de la grande Côte, Lyon_Croix Rousse aujourd'hui

Les moyens de chauffage ont évolué et les faux plafonds ôtés.
Tout naturellement, à la vue de la hauteur des plafonds,
les nouveaux habitants installent les « mezzanines »
qui prennent ainsi la place des « suspentes » !

 

Qui sont ces Canuts ?

Un canut à son métier

Les Canuts chef d’atelier, notamment, mais aussi les nombreux compagnons, sont

des travailleurs manuels instruits et d’une grande culture.

Ils lisent, discutent,

sont parfaitement conscients de leur savoir-faire,

de leur place dans la structure préindustrielle de l’époque.

Ils participent à des associations

prônant la solidarité
ou
la place essentielle de l’homme au cœur de l’économie.

 

 

Origine du mot "canut"

Le mot de « canut » reste aujourd’hui mystérieux, sujet à de nombreuses interprétations ou légendes
et fait même encore l’objet de polémiques.

L’ÉCHO DE LA FABRIQUE organisa entre octobre 1832 et avril 1833
un concours pour remplacer ce mot considéré comme péjoratif par certains canuts.

La légende...

Inspirée d'une condensation de l'expression "Voici les cannes nues!".

Au cours de la Révolution française, les ouvriers en soie se retrouvèrent dans la misère
et durent vendre les breloques en or et en argent de leurs cannes de compagnonnage.
A leur passage, on disait alors :"Voici les cannes nues!"..

Afficher l'image d'origine

Le Littré de la grand' Côte, la bible du parler lyonnais,
publié en 1894, 
de Nizier du Puitspelu,
revient sur l’origine du mot canut.

Le mot vient de canne et du suffixe "ut" ou "u" qui représente le latin "orem", en français "eur".

Le canut est donc celui qui use de la canne (roseau), dont a été faite la cannette,
qui est un petit tuyau de bois qu’on charge de soie pour faire la trame d’une étoffe.

 

 

Définition du Canut
par Maurice La Châtre dans le Nouveau Dictionnaire Universel de 1865

_cliquer pour lire_

 

 

Dans la Maison des Canuts.../vidéo

_Cliquer pour voir_

 

 


Grâce à leur travail...

 

Catalogue de soieries_Musée des Tissus Lyon
Catalogue de soieries
_ Musée des tissus et des arts décoratifs de Lyon_

 

Veste en soie brodée, 1745-1750Veste en soie brodée 18e siècle_LACMA

_Musée d'Art du Comté de Los Angeles (LACMA)_

 

Robe de soie 18e siècle_Musée des Tissus Lyon_Robe de soie du 18e e siècle
_Musée des tissus et des arts décoratifs de Lyon_

 

Et pour ne pas oublier...

 

LE MUR DES CANUTS

situé Boulevard des Canuts dans le quartier de Croix-Rousse

Réalisé en 1987, revu en 1997
Par CitéCréation_coopérative d’artistes lyonnaise créée en 1978

Un immense (1200 m2) mur ouvert de perspectives et d'une haute volée d'escaliers.
De part et d'autre s'organise la vie quotidienne d'authentiques habitants du quartier,
dépositaires de l'héritage des canuts et du patrimoine de la soie.
En s'approchant, on découvre ainsi de hautes fenêtres caractéristiques de l'habitat canut,
et différents éléments propres à l'activité soyeuse :
bobines de soie, métiers à tisser, travail de la soie, etc...

 

Mur des Canuts_Croix-Rousse Lyon

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