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Lloas
19 mai 2011

Les oiseaux de passage

Ô vie heureuse des bourgeois
Qu'avril bourgeonne
Ou que décembre gèle,
Ils sont fiers et contents.

Ce pigeon est aimé,
Trois jours, par sa pigeonne
Ça lui suffit il sait
Que l'amour n'a qu'un temps.

Ce dindon a toujours
Béni sa destinée
Et quand vient le moment
De mourir il faut voir

Cette jeune oie en pleurs
C'est là que je suis née
Je meurs près de ma mère
Et j'ai fait mon devoir.

Elle a fait son devoir
C'est a dire que onques
Elle n'eut de souhait
Impossible elle n'eut

Aucun rêve de lune
Aucun désir de jonque
L'emportant sans rameur
Sur un fleuve inconnu.

Et tous sont ainsi faits
Vivre la même vie
Toujours pour ces gens là
Cela n'est point hideux

Ce canard n'a qu'un bec
Et n'eut jamais envie
Ou de n'en plus avoir
Ou bien d'en avoir deux

Ils n'ont aucun besoin
De baiser sur les lèvres
Et loin des songes vains
Loin des soucis cuisants

Possèdent pour tout coeur
Un vicere sans fièvre
Un coucou régulier
Et garanti dix ans.

Ô les gens bien heureux
Tout à coup dans l'espace
Si haut qu'ils semblent aller
Lentement un grand vol

En forme de triangle
Arrive, plane et passe
Où vont ils? ... qui sont-ils ?
Comme ils sont loins du sol.

Regardez les passer, eux
Ce sont les sauvages
Ils vont où leur desir
Le veut par dessus monts

Et bois, et mers, et vents
Et loin des esclavages
L'air qu'ils boivent
Ferait éclater vos poumons

Regardez les avant
D'atteindre sa chimère
Plus d'un l'aile rompue
Et du sang plein les yeux

Mourra. Ces pauvres gens
Ont aussi femme et mère
Et savent les aimer
Aussi bien que vous, mieux.

Pour choyer cette femme
Et nourrir cette mère
Ils pouvaient devenir
Volailles comme vous

Mais ils sont avant tout
Des fils de la chimère
Des assoiffés d'azur
Des poètes des fous.

Regardez-les vieux coqs
Jeune Oie édifiante
Rien de vous ne pourra
monter aussi haut qu'eux

Et le peu qui viendra
d'eux à vous
C'est leur fiante
Les bourgeois sont troublés
De voir passer les gueux

Regardez-les vieux coqs
Jeune Oie édifiante
Rien de vous ne pourra
monter aussi haut qu'eux

Et le peu qui viendra
d'eux à vous
C'est leur fiante
Les bourgeois sont troublés
De voir passer les gueux.

Mots
Jean Richepin La chanson des gueux, 1876

  musique Georges Brassens

La chanson des gueux (Edition Librairie  illustrée) 01248 Album CD " La religieuse ""La_Religieuse_cover_s200

Cliquer droit_Ouvrir le lien dans un nouvel onglet_pourécouter: http://www.deezer.com/listen-917389

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Lloas a écrit...sur In Libro Veritas

j'aimerais tant
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